Juridique/Judiciaire

ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES : Les Avantages de la loi du 08 avril 2020 relative au Tribunal de Commerce /chambre d'Appel.

ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES :  Les Avantages de la loi du 08 avril 2020 relative  au Tribunal de Commerce /chambre d'Appel.

Les réformes de la justice commerciale constituent un des piliers majeurs du programme de réforme de l’environnement des affaires et de la compétitivité en sigle le PREAC. Ce Programme opérationnalise l’objectif stratégique du Plan Sénégal Emergent de doter le Sénégal d’un climat des affaires attractifs aux investissements privés de qualité ayant un impact considérable sur la transformation structurelle pour plus de valeurs ajoutées et d’emplois.  A cet effet, le Ministère de la Justice avec l’implication des organisations du secteur privé et l’appui notamment de l’APIX, s’est engagé dans le vaste chantier de la modernisation de ses services, du renforcement de l’Etat de droit, de l’amélioration de l’environnement des affaires et de la sécurisation des personnes et des biens.  

Des réformes ont été conduite tant au niveau communautaire (OHADA) qu’au niveau national pour bâtir un environnement juridique et judiciaire compétitif et respectueux des droits fondamentaux.

Après avoir renforcé le système procédural et introduit dans la législation les modes alternatifs de règlements des différends au Sénégal par la prise  du décret n° 2013-1071 du 6 août 2013 portant Code de Procédure civile et du décret 2014-1653 du 24 décembre 2014 relatif à la médiation et à la conciliation, le Sénégal a adopté la   loi 2017-27 du 28 juin 2017  portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux de commerce et des chambres commerciales d’appel. Cette loi présente une originalité marquée par le renforcement de la spécialisation dans le traitement des contentieux économiques et l’avènement de juges consulaires dédiés issus du milieu d’affaire, qui siègent à côté de juges professionnels pour ne pas dire des magistrats.  Le Tribunal de Commerce Hors Classe de Dakar (TCHCD) installé le 23 février 2018 est pleinement fonctionnel avec des audiences programmées et affichés en ligne, des jugements et les décisions de justices publiées.

Sur les deux ans d’exercice, le Tribunal de commerce (TC) a rendu 11 175 décisions pour une valeur de 269 343 837 502 F CFA dont 163 405 835 977 F CFA concernant le contentieux bancaire. Seul 1 506 décisions ont fait l’objet d’appel, soit un taux de 13,47%. 

Cette réforme a permis de renforcer la protection juridique des investisseurs et de réduire les délais d’exécution des contrats d’au moins de 100 jours, selon l’indicateur exécution de contrat de la notation Doing Business, en passant de 750 jours avant l’établissement du tribunal de commerce à 650 jours après une année de fonctionnement.

Malgré ces performances notables, la nécessité de rénover la  loi 2017-27 du 28 juin 2017 pour corriger certaines imperfections s’est avérée   en plus de la volonté d’ intégrer en même temps des innovations qui ont fait ailleurs leurs preuves dans la gestion des contentieux économiques. C’est pour cela que les modifications et améliorations apportées par loi n° 2020-14 du 08 avril 2020, ont portés sur :

• la clarification des compétences des tribunaux de commerce et des chambres commerciales d’appel par rapport au tribunal de grande instance notamment en ce qui concerne la saisie immobilière ;

• la limitation du nombre de renvois, désormais fixé à trois (03) ;

• l’affaissement du taux du ressort dorénavant fixé à dix millions (10 000 000 F CFA) au lieu de vingt-cinq millions (25 000 000 F CFA). En d’autres termes, le TCHCD ne statue en premier et dernier ressort que lorsque le montant du litige n’excède pas 10 000 000 F CFA;

• l’introduction de la conférence préparatoire dans le processus de mise en état; 

• la consécration du traitement des «petits litiges » ou «petits contentieux». Ils couvrent les litiges dont le taux est inférieur ou égal à 5 millions et n’ayant pas fait l’objet de contestation. Leurs règlements sont encadrés dans un délai de 45 jours.

Ces innovations sont importantes car elles donnent plus de lisibilité aux parties, renforcent leurs droits dans la préparation des procès, limitent les pratiques dilatoires et permettent de sécuriser les délais de de jugements dans les 90 jours édictés par la loi en toute transparence. 

Toujours dans la poursuite de la consolidation des performances des tribunaux de commerce et les chambres commerciales d’appel, la prise, cette année, du décret n°2020-540 du 26 février 2020 relatif à la communication par voie électronique, formalise l’usage des procédures électroniques pour faire des assignations et des échanges de documents et permet de mieux organiser les procès et de publier les décisions de justices en ligne.

La mise en œuvre de ces deux mesures de réformes va améliorer le score du Sénégal dans la notation Doing Business. En effet l’indice sur la qualité des procédures judiciaires va passer de 6,5 à 13,5 points sur une échelle de 0 à 18 et le délai de jugement des litiges pourraient passer de 650 jours à 550 jours.

Nous comprenons en matière commerciale une chose est de bien juger mais l’autre chose, la plus importante, est de recouvrer la créance à temps, après la publication et la notification de la décision de justice. A cet effet, le Gouvernement devra renforcer la législation et les moyens sur la partie exécution de la décision de justice afin que les délais globaux de traitement de contentieux économique du système judiciaire sénégalais se rapprochent des délais médians de 500 jours observés chez des plus performants au monde, à compter de l’inscription de l’affaire jusqu’au moment où la créance est totalement recouvrée.

Enfin, dans la perspective de faire du Sénégal, notamment la place de Dakar, une référence mondiale dans la gestion et le jugement des contentieux économiques et financiers, il est utile d’entamer le dialogue entre les différentes parties prenantes pour assoir un ordre juridictionnel autonome de la justice commerciale avec l’érection d’une cours d’appel de commerce et un réseau de tribunaux de commerce répartis dans les pôles territoires en fonction de la densité économique et le volume des contentieux économiques en parallèle de la professionnalisation des mécanismes et organes de jugements  alternatifs à savoir la médiation, la conciliation et l’arbitrage. 

À travers ces chantiers de réformes, le Sénégal achèvera la mise en œuvre de procédures judiciaires appropriées d’une justice commerciale autonome et efficace pour la protection des investissements afin de bâtir une confiance durable, gage de la stabilité et de la sécurité juridique pour développer un secteur privé et des champions forts qui drainent de la valeur ajoutée, de l’innovation et de l’emploi tout en accroissant sa compétitivité et ses parts de marché en Afrique et dans le monde.

CNP/MLB/APIX



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